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Le Président Poincaré en visite dans l’Est

(Du 21 au 23 septembre 1919)

Le 21 septembre, après avoir visité dans la matinée Briey, Audun-le-Roman et Longuyon, M. Raymond Poincaré, parti la veille de Paris, arrivait vers 14 heures à Longwy. Il se rendit d’abord au cimetière, d’où il gagna Longwy-Haut. Il y prononça, devant le tragique décor de l’Hôtel de Ville presque réduit à un pan de mur, un très émouvant discours qu’il termina en décorant la cité de la Légion d’Honneur.

Le lendemain, il décorait Saint-Mihiel de la Croix de guerre et présidait à la pose de la première pierre d’un monument destiné à commémorer la délivrance de la ville par la 1ère Armée américaine.

Dans la même journée, venu saluer les tombes militaires de la Vaux-Racine, il trouvait, le long des rangées de croix, des fillettes au visage grave qui l’attendaient, les bras chargés de fleurs, pour rendre hommage aux français endormis là … Enfin, avant de rentrer à Paris, il visitait le champ de bataille du bois d’Ailly et faisait, avec Mme Poincaré, une courte station dans sa propriété de Sampagny, dévastée par les obus. (L’illustration du 27 septembre 1919)

A Briey

M. Poincaré se rend sur la place de l’Eglise où sont réunies les autorités de la ville et la population.

Place de l’Eglise, des enfants des écoles remettent au président de la République des gerbes de fleurs.

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Très fiers, les petits garçons agitent frénétiquement leurs petits drapeaux.

A Audun- le Roman

M. Poincaré ne sort pas de la gare où sont venus le saluer les 500 habitants rentrés à Audun sur les 1200 dont se composait la population en 1914 et pour lesquels des abris provisoires ont été construits.

La ville a été calcinée, les pierres et les chaux s’envolent au vent. Le responsable est le Général von Wahs et le président de la République promet que justice sera rendue.

A Longuyon

Dès son arrivée, M. Poincaré évoque le long martyre de Longuyon, livré, dès août 1914, aux horribles forfaits du militarisme prussien. Il rappelle le massacre des vieillards, l’exécution sommaire des petits garçons et des fillettes, l’assassinat des femmes, l’incendie de la ville. Le président s’attarde sur la mort héroïque des fils de Mme Carquin « sans motifs, on arrache les deux aînés de ses fils à cette malheureuse mère ; l’un âgé de dix-huit ans, l’autre, Paul, âgé de quinze ans. On les empoigne, on les traîne à une distance de quelques mètres, avec un vieil employé des chemins de fer en retraite, M. Bossier. Le plus jeune, Paul, s’évanouit lorsqu’il est mis en joue ; on le tue pendant qu’il est sans connaissance ; son frère le voit mourir, regarde en face les soldats qui le visent à son tour et pousse en tombant sous les balles, le simple cri de « Vive la France »

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Dans les ruines de l’Hôtel de Ville de Longwy-le- Haut, la foule écoute le discours de M. Poincaré.

A Longwy

Lorsque le président de la République arrive en gare de Longwy la pluie tombe abondamment. Plusieurs milliers de personnes sont rassemblées. Elles font au chef de l’Etat une magnifique ovation. M. Poincaré se dirige vers le cimetière où il dépose une palme au pied du monument érigé en 1912 à la mémoire des morts des trois premiers sièges 1792- 1815 - 1870.

au cimetière

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Puis le cortège pénètre dans l’enceinte fortifiée créée par Vauban. Le spectacle est émouvant. Pas une maison n’est debout. Il n’y a rien que des ruines et le fronton de l’Hôtel de Ville, où s’aperçoit encore les armes de la ville. Autour de la tribune, tous les habitants se pressent, au premier rang les petits enfants avec dans les mains des fleurs et des drapeaux.

Le président prend la parole : Il rappelle que lors de la visite qu’il fit à Longwy en 1912, il rendait hommage à la prospérité de leur région, grâce à la paix et au travail de ses habitants. Deux plus tard les Allemands ont démoli les hauts fourneaux, rasé les fours Martin, enlevé le matériel roulant et la machinerie, vidé les magasins et emporté les approvisionnements.

C’est un devoir national que la partie de la France que l’ennemie a foulée aux pieds, ravagée et appauvrie, soit le plus rapidement possible rendue habitable, apte comme autrefois à la culture et à l’industrie, propre à recevoir ceux qui pendant cinq ans ont éprouvé les affres de l’occupation ennemie et ceux qui ont subi les tristesses de l’exil.

C’est avec l’espoir de cette prompte résurrection que je remets à la ville de Longwy au nom du gouvernement de la République la croix de la légion d’Honneur.

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A la tribune, Poincaré lit son discours puis, va épingler la croix de la légion d’honneur sur le coussin que nous apercevons à gauche au premier plan.

Aux aciéries de Longwy

M. Poincaré se rend aux aciéries de Longwy à Saint-Martin pour constater les dégâts commis par les Allemands. Des usines il ne reste que des vestiges. Mais déjà de ces décombres, l’énergie des meusiens a fait surgir une activité nouvelle. Des hangars abritent des machines. Le labeur a recommencé. A quatre heures, le président de la République rentre en ville. Aussi chaleureusement acclamé qu’à son arrivée. Il se rend à la gare et quitte Longwy à cinq heures.

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La visite des aciéries par le président de la République. M. Oudaille précède le chef de l’Etat en portant sur son bras un parapluie et un manteau

A Saint-Mihiel

Le président a passé la matinée à Saint-Mihiel. Après une brève réception à la gare, il s’est rendu sur la place des halles pour y poser la première pierre du monument qui doit être érigé en hommage de reconnaissance aux armées américaines qui délivrèrent Saint-Mihiel de l’occupation allemande.

Le chef de l’Etat, en répondant au maire, prononce un éloquent discours dans lequel il fait l’historique des événements qui aboutirent à la délivrance de la ville. Le 12 septembre un bombardement de quatre heures surprit les Allemands qui, déconcertés, cédèrent à l’élan de l’infanterie américaine. Leur déroute fut complète. Quatorze mille prisonniers, quatre cent soixante-cinq canons de tous calibres, sept cent cinquante mitrailleuses, des quantités énormes de munitions, du matériel de transport, des équipements. Le 13 septembre, au matin, le général Pétain et le général Pershing, entraient côte à côte, dans les rues pavoisées pour célébrer la victoire de nos armées pour les habitants de Saint-Mihiel.

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Le président prononce son discours ; à sa gauche le maire Albert Thiery

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Le président accompagné par le docteur Thiery au milieu d’infirmières

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Le président décore Saint-Mihiel de la croix de guerre 1914-1918

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Sur la place des Halles les honneurs sont rendus par le 150 ème régiment d’infanterie avec le drapeau.

Sur la place des Halles la foule et la musique militaire attendent le cortège présidentiel

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M. Poincaré attend qu’un ouvrier lui présente la truelle et le mortier pour sceller la première pierre du monument.

La cérémonie terminée, le chef de l’Etat se rend en automobile au cimetière de La-Vaux-Racine où reposent huit cents combattants tombés sur la côte Sainte-Marie, à Chauvoncourt et sur la rive droite de la Meuse. Une stèle blanche a été érigée sur laquelle on lit ces mots « Aux morts pour la Patrie, Saint-Mihiel reconnaissante ! »

Après les allocutions du maire et du président, M. Poincaré dépose une palme au pied du monument. Mgr Ginisty, évêque de Verdun, prend alors la parole :

« Après les paroles éloquentes de la terre, dit-il, nous allons prononcer la parole du ciel, la parole de l’Eternité ». Humble représentant de l’Eglise catholique, Mgr Ginisty déclare que dans le culte qu’il représente il y a place pour toutes les âmes, pour tous les héros : « Nous ne faisons aucune distinction dans nos prières ». Et le prélat, s’agenouillant, récite une prière pour le repos de l’âme des soldats disparus.

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Au cimetière, Mme Poincaré venant de Paris a rejoint le président. M. Oudaille est au premier plan sur la gauche.

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le cortège passe devant la stèle blanche.

Le président de la République assiste ensuite à un banquet offert en son honneur. Après le déjeuner il se rend au Bois d’Ailly et s’arrête au pied du monument sur le socle duquel on peut lire les noms des villages autour desquels le combat fit rage. Il prend la parole pour décrire la nature des combats : « un jour une attaque pour gagner péniblement un morceau de terrain, un autre jour les Allemands reprenaient l’avantage. La mort continuait son œuvre impitoyable sans qu’aucun succès appréciable fût jamais obtenu ».

En quittant le Bois d’Ailly, M. Poincaré se dirige vers Sampigny. Il doit traverser le champ de bataille, défoncé par les obus, labouré par les tranchées. Il arrive enfin devant la propriété qu’il possède dans la commune : le clos Sampigny. Le président de la République et Mme Poincaré parcourent à pied Sampigny, acclamés par la population, qui se presse autour d’eux. Le chef de l’Etat serre les mains qui se tendent, s’entretient familièrement aves les habitants, embrasse des enfants.

Il pénètre ensuite dans sa villa. L’intérieur n’est qu’un amas de ruines. Mais les murailles se dressent encore malgré les efforts des Allemands. A six heures du soir le président de la République monte dans le train qui doit le ramener à Paris.

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Le président de la République et Mme Poincaré à Sampigny

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Le président Poincaré devant sa villa en ruine après les bombardements Allemands. Sur la gauche M. Oudaille de profil

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La vue complète de la villa que quittent le président et Mme Poincaré

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